L'armée française est dans une position difficile suite à la démission le 24 mai des dirigeants civils de transition, sous la force des leaders du coup d'État d'août 2020.
Une série de coups d'État ont poussé la France à suspendre ses opérations militaires conjointes
Le Mali se trouve dans une situation extrêmement fragile. Entre les querelles des élites politiques dans la capitale et la violence meurtrière des militants dans le Nord et le centre du pays, la situation ne semble pas en voie de s'améliorer. Cela pourrait donner aux groupes militants une plus grande marge de manœuvre pour commettre des attentats dans les semaines et les mois à venir.
La France suspend ses opérations militaires conjointes en réponse au coup d'État du 24 mai
La fragilité de l'environnement politique et sécuritaire au Mali va vraisemblablement s'aggraver après le coup d'État du 24 mai -- le second en moins d'un an. L'événement provoqué par des leaders militaires, qui ont forcé le président, le premier ministre et le ministre de la défense du gouvernement de transition à démissionner, a été largement condamné par les principaux partenaires internationaux du Mali. L'auteur du coup d'État, l'ex-colonel de la junte militaire Assimi Goïta, s'est depuis lors déclaré le nouveau président de transition du pays. En guise de représailles, la France, qui est le principal partenaire pour la sécurité du Mali, a suspendu le 4 juin ses opérations militaires conjointes dans le pays.
Conséquences pour le Mali du point de vue militaire et sécuritaire
La décision de Paris de rompre les liens avec l'armée malienne aura d'importantes conséquences sur la sécurité du pays. La France a maintenu des milliers de soldats en poste dans la région du Sahel sillonnée par les groupes militants, particulièrement au Mali, dans le cadre de son opération stratégique antiterroriste Barkhane suite à son intervention de 2013. En conséquence, l'arrêt soudain de la coopération française va créer un vide que les groupes militants liés à Al-Qaïda et à l'État islamique vont s'empresser de combler. Cela est dû à l'acrimonie de l'armée malienne, qui souffre de corruption galopante, d'une pénurie d'équipement chronique, d'un entraînement inadéquat et d'un moral au plus bas. Les militants vont donc profiter de l'absence de soutien militaire de la France, incluant ses capacités de soutien terrestre, aérien et de renseignement à l'armée malienne, pour commettre davantage d'attentats meurtriers.
De plus, le fait que les troupes maliennes sont souvent mal entraînées les amène à commettre des violations des droits humains contre des civils dans le Nord et le centre du pays. Le retrait du soutien français pendant les opérations militaires maliennes va accroître les probabilités d'abus contre les civils. Ces actes vont encore dégrader les perceptions déjà négatives des forces armées du Mali dans les territoires éloignés du pays, alimentant ainsi la propagande des militants et leur capacité à recruter parmi les mécontents.
La transition vers des élections démocratiques demeure incertaine
Pendant qu'à Bamako, les politiciens se querellent au sujet du processus de transition, les graves problèmes systémiques du pays vont perdurer dans l'avenir, incluant sa corruption endémique et sa faible croissance économique. Cela pose des risques importants pour la sécurité et la continuité des affaires dans la région. De fait, il est possible que l'instabilité politique actuelle empêche le gouvernement du Mali d'effectuer sa transition vers les élections démocratiques prévues pour le 27 février 2022. Jusqu'ici, les auteurs du coup d'État ont promis publiquement de laisser en place l'échéancier électoral. Cependant, on rapporte des pressions grandissantes au sein des forces armées pour retarder davantage les élections.
Si un ajournement devait être annoncé, il donnerait lieu à une situation encore plus volatile. Pour dire les choses simplement, si les élites politiques du Mali n'arrivent pas à remettre la transition sur les rails, il est presque certain que des troubles civils à grande échelle vont éclater. Déjà, un retour des grandes manifestations a eu lieu le 4 juin quand le groupe d'opposition Mouvement du 5 Juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) a réuni des milliers de gens pour manifester à Bamako pour réclamer le retour à la démocratie. Si les autorités annoncent un ajournement, les élections seront retardées au-delà de l'échéancier actuel, et on peut s'attendre à des grèves paralysantes et une mobilisation de la société civile pour faire pression sur les autorités afin de revenir à la transition démocratique.
La faiblesse des institutions électorales pose d'importants risques à la sécurité et à la continuité des affaires dans la région.
En conséquence, si un tel scénario se réalise, les entreprises et leurs employés présents à Bamako et dans d'autres zones urbaines seront exposés à un risque élevé en raison des affrontements renouvelés entre forces de sécurité et manifestants. Cela sera particulièrement vrai à Bamako où se trouve le gouvernement et de nombreux bâtiments d'importance et lieux symboliques, comme le Monument de l'Indépendance. Les manifestants pourraient à nouveau bloquer les routes en brûlant des pneus ou avec d'autres barrages improvisés. Il faut noter que la police malienne, tout comme l'armée, souffre de corruption généralisée et manque d'entraînement et d'équipement, ce qui les rend susceptibles de faire feu à balles réelles sur la foule, et accroît les chances de compter des décès parmi les manifestants et les passants.
Étant données les luttes de pouvoir qui se prolongent au Mali, il est très probable que le pays continue de s'enfoncer dans la crise politique et sécuritaire. La situation va donc demeurer volatile et continuer d'entraver la continuité des affaires dans la région, ce qui implique une vigilance accrue pour les entreprises et leurs employés au Mali dans les prochains 30 à 90 jours.
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