Les États-Unis ont annoncé le 26 mai qu'ils mettraient fin à leur aide militaire suite au dernier coup d'État.
Photo de l'U.S. Air Force prise par le Master Sgt. Ken Bergmann, domaine public, via Wikimedia Commons
Le Mali est aux prises avec les conséquences du coup d'État du 24 mai contre son gouvernement provisoire, le second à survenir en moins d'un an. Pendant que les dirigeants politiques se querellent à Bamako, ils ne sont pas près de résoudre les faiblesses systémiques du pays, comme sa croissance morose et sa cause perdue contre les groupes militants, ce qui pose des risques importants pour la sécurité de la région et la continuité des affaires.
Un coup d'État dans un coup d'État
Alors que la situation du Mali était déjà inquiétante, elle s'est encore empirée le 24 mai quand les forces armées du pays ont détenu les dirigeants civils du gouvernement provisoire, incluant le président, le premier ministre, et le ministre de la défense. Suite à leur arrestation, les trois hommes ont annoncé leur démission au moment d'être libérés.
L'incident a été condamné par d'importants partenaires internationaux comme la France, les États-Unis et l'Union Européenne. Depuis lors, Assimi Goïta, ancien colonel de la junte militaire et auteur également du coup d'État précédent, s'est lui-même déclaré président de transition.
Des faiblesses systémiques minent la stabilité des institutions
Bien qu'on ne sache pas encore comment la France et d'autres alliés internationaux du Mali comptent user de leur influence pour faire reculer le nouveau gouvernement, ces événements mettent au jour plusieurs problèmes graves pour le Mali. Tout d'abord, la grande faiblesse des institutions politiques du pays les rend vulnérables à la saisie, à la corruption ou à l'interférence par les forces armées.
En fait, on pourrait dire que la junte militaire n'a jamais vraiment cédé le pouvoir au gouvernement provisoire civil depuis son précédent putsch, comme l'a démontré le retrait rapide du pouvoir civil.
Deuxièmement, ce « coup d'État dans un coup d'État » souligne les défis auxquels s'exposent la France et son armée, principaux garants de la sécurité dans les pays du Sahel. La France s'est beaucoup investie dans l'appui à ses alliés continuellement affaiblis du Sahel depuis son intervention militaire au Mali en 2013. Depuis ce temps, elle compte des milliers de militaires et de ressources aériennes à travers la région, dont le but est d'affaiblir les groupes militants liés à Al-Qaïda et à l'État islamique.
Bien que cet investissement ait pu éviter un effondrement des États, peu d'initiatives ont été proposées pour renforcer les institutions et affirmer l'État de droit. Au lieu de cela, la protection militaire de la France a eu pour conséquence involontaire de permettre aux élites politiques comme celle du Mali (l'épicentre du militantisme dans la région) d'éviter de procéder à la réforme difficile mais nécessaire des institutions d'État prédatrices qui engendrent des ressentiments partout dans le pays.
Dans le Nord du Mali par exemple, les civils s'efforcent d'éviter les agents du gouvernement central car ceux-ci tendent à adopter des comportements prédateurs incluant des demandes de pots-de-vin et des violations des droits humains.
Des risques significatifs pour la sécurité de la région et la continuité des affaires
En conséquence, à mesure que les élites politiques de Bamako se disputent le pouvoir, il sera important de surveiller les groupes militants de la région qui pourraient chercher à profiter de la distraction des gouvernements centraux. En particulier, les groupes liés à Al-Qaïda et à l'État islamique dans les pays du Sahel vont certainement continuer de s'en prendre aux forces armées locales et étrangères afin de compromettre la sécurité. Leurs efforts se trouveront justifiés par les conséquences du second coup d'État, puisque les États-Unis et d'autres alliés ont mis fin à leur aide militaire aux forces maliennes.
Si la situation politique au Mali doit encore s'empirer, ces groupes tenteront sûrement d'entrer dans les bonnes grâces de la population locale en l'approvisionnant en ressources et autres matériaux que les gouvernements centraux, faibles et mal coordonnés, ne leur fournissent plus. Ces campagnes de propagande pourraient accroître encore l'appui des civils à ces groupes terroristes dans certaines localités, et leur fournir ainsi des sources supplémentaires de renseignement et de main-d'œuvre dans les mois à venir.
Le Mali est dans une situation extrêmement périlleuse. Entre les élites politiques qui se querellent dans la capitale et la violence de plus en plus meurtrière des militants dans le Nord et le centre du pays, la situation ne semble pas en voie de s'améliorer. Cela va donner aux militants encore plus de marge de manœuvre pour commettre des attentats dans les semaines et mois à venir.
Alertes de renseignement connexes
Warning | 25 May 2021 | 11:54 AM UTC | Mali: Increased security presence possible in Bamako after the arrest of key interim government figures in a possible coup attempt, May 24 /update 2
Critical | 24 May 2021 | 04:52 PM UTC | Mali: Heightened security presence likely in Bamako after arrest of key interim government figures in possible coup attempt May 24 /update 1
Critical | 24 May 2021 | 03:11 PM UTC | Mali: Military units reportedly circulating in Bamako following arrest of civilian political leaders May 24
Pour un accès gratuit illimité aux alertes de renseignement et aux rapports nationaux de Crisis24, inscrivez-vous ici.